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MONCH

MONCH


Juin 2022
Photographe


L’humain – ses questionnements fondamentaux, ses doutes, ses expressions – je le cherche dans les formes aléatoires de la matière photographiée et ses mélanges. C’est un travail à l’instinct.

Je me plais à dompter l’accident dans une démarche qui veut sortir de l’art confortable.
Je ne souhaite rien imposer. Le sens que je mets dans mes images, qu’il soit conscient ou inconscient, doit s’effacer pour laisser place au ressenti de chacun.

Esthétiquement, j’oriente mon travail photographique vers une plastique proche de la peinture, du dessin, de la gravure. J’aime à cultiver l’ambiguïté sur la nature réelle du medium utilisé. De ce fait, le public s’interroge souvent, se trompe parfois.
Cette ambiguïté, mêlée à une écriture personnelle et unique, met en valeur l’étrangeté, la poésie et l’émotion que je souhaite faire passer dans mes images.
La nuit, les ombres jouent avec le reste de lumière agonisante de la chambre à coucher. Des personnages menaçants et autres visages aux formes inquiétantes naissent soudain d’un vêtement en boule, d’un repli d’oreiller… Rares sont ceux qui, enfant, n’ont pas souvenir de ces moments intenses ! Puis, on grandit… l’enfance s’en va et très souvent l’imagination qui l’accompagne !
C’est un peu pour retrouver cet imaginaire que j’ai commencé par photographier des visages dans les formes de la nature, racines, troncs, souches, bois flottés, pierres, taches, vieux murs etc. Ces formes anthropomorphiques me « parlent » quand, au-delà de leur simple apparence humaine, l’expression est forte, que les sentiments humains extrêmes effleurent, quand justement je retrouve un peu mes peurs enfantines. Ils sont rarement « gentils » ces personnages imaginés dans le cerveau d’un enfant !
Puis, frustré par le résultat trop approximatif de ces photographies, je me suis mis à manipuler ces images pour leur donner encore plus de force. Le dessin de la nature me donne l’idée, la trame, je n’ai plus qu’à tirer l’écheveau de mon imagination. Je vais vers une interprétation plus personnelle en modifiant, sculptant, peignant mes matières photographiques.
Dans le prolongement naturel de cette démarche d’humanisation de la matière, j’ai ensuite inversé le jeux en partant du portrait photographique ou du dessin… que je fais retourner à l’état végétal et/ou minéral. Une autre démarche est de me passer de l’humain en abordant le paysage, que je fais aussi surgir de ces taches murales et autres mélanges photographiques.
Je prends soin de laisser le côté naturel et brut prédominer, ce qui laisse un résultat ambigu et flou entre le vrai du faux, entre le naturel et l’apporté, entre l’inerte et le vivant.
Effacement, déstructuration, expressions humaines intenses, paysages viscéraux, dissolution dans la matière minérale et/ou végétale, sont des thèmes omniprésents… qu’importe le pourquoi, je fais juste parler ce que j’ai de plus profond en moi avec le plus de spontanéité et de sincérité possible. Si mon langage est compris, chacun ensuite, pourra voir sa propre sensibilité, sa propre histoire… son intimité, par simple effet miroir.

La création est pour moi source de plaisir et à la fois un moyen cathartique d’évacuer mes « trop-pleins ». Cet acte est très vite devenu indispensable à mon équilibre.
Photo-manipulation ? Intrinsèquement oui … mais je ne souhaite pas que mes images laissent cette impression, ni celle du travail d’un (info)graphiste. J’aime quand la technique utilisée se fait le plus discrète possible et n’utilise jamais aucun filtre ni d’effet logiciel tout prêt. Je me sers de mes éléments photographiques comme un peintre utilise sa palette de couleurs. Mes tirages sur papier mat sont aussi étudiés pour sortir un peu plus de l’aspect photographique.

La question sur la nature exacte de mes images est régulièrement posée: Est-ce de la photo, de la peinture, de la gravure et même de la sculpture pour certains ? Cette ambiguïté sur la nature de mon travail est tout à fait volontaire, ce mystère latent me plait.

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