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Eva MIFSUD

EVA MIFSUD


Peintre
Janvier 2019

« Saurais-tu parler de ma peinture ?… »

Ce sont les mots qu’elle m’adressa, ce jour-là, pinceau en main. Pris de court, je tentai quelques esquives, évoquant entre autres bonnes raisons ma méfiance atavique pour ces mots qui croient tout savoir dire.

 » Mais je ne me méfie pas des mots, je n’en ai pas pour ma peinture  » m’objecta-t-elle pendant que sa brosse s’activait,  » Et il me plairait d’en avoir « , avait-elle ajouté après un silence.

Et pendant que je cherchais, ces mots m’échappaient, poisseux d’insignifiance, gluants de vacuité, empêtrés de rationalisme, tandis que mon regard errait sur les toiles qui désorganisaient son atelier et que flottaient des pensées tentant de rattacher cette peinture à un mouvement connu.

Contemporaine, elle l’était, certes, mais pour autant inclassable. Ni académique, ni abstraite, ni réaliste, pas vraiment figurative. Décidément, aucun qualificatif ne s’accordait à cette sensation que j’éprouvais d’un déjà vécu, sensation fort éloignée elle-même de celle d’un déjà vu. De cela, j’étais certain sans avoir le début d’un pourquoi.

Viscérale. Violente. Dérangeante. Tout comme sa peinture, cette réminiscence l’était, aussi sûrement qu’elle n’était pas picturale. Il me fallait chercher ailleurs.

Et comme souvent, c’est au moment de laisser tomber que jaillit la réponse.

Bukowski !

J’étais chez Bukowski et revivais le déchaînement d’entrailles soulevé à sa lecture. Son écriture avait lu en moi de l’inconnu.

Et ses tableaux me regardaient. Sa peinture voyait en moi d’autres inexplorés…

Bernard Convers.

https://peintreva.wixsite.com/peintreva